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27 juillet 2009 1 27 /07 /juillet /2009 10:20

Ma bibliothèque…imposante compagne de mes heures-évasion,  leurres dépression,  heurt -passion.Confidente silencieuse de mes maux qui se pressent en mots indistincts, indicibles,  saignements qu'elle tempère, enseigne à assigner à leur juste place…Ecueil doux qui m'absorbe dans ses réconforts de récits lointains, de vies d'autres humains que moi, d'autres voisins d'infortune à la pelouse convoitée ou agréablement plainte de loin…incitatrice maligne aux libératrices catharsis de l'âme .

Précieuse amie discrète de mes rires, de mes larmes, berceau d'intenses périples, accès à d'autres mondes inaccessibles, intemporels, féériques.

Cimetière joyeux de défunts bavards et qui débattent en intertextualité, morts-vivants sympathiques aux conseils avisés, endormis réveilleurs de conscience, incarnation meublée du silence où en interstices feuillues se tissent des conversations interminables et éternelles.

 

Ma bibliothèque….poussiéreuse parfois parce que bras m'en tombent devant la masse de travail à fournir pour récupération de la brillance originelle.

 

Ma bibliothèque….nébuleuse les nuits où ma chaise à bascule, caprice romanesque qui brise mon dos fourbu d'insomnie, vient flirter avec le plancher vieillissant et patiné ….

 

Ma bibliothèque….donneuse de tant d'espoirs et de soutiens ,transis dans ses bras boisés et solides - supports dociles du poids de mes dépenses livresques passagéres.

 

 

Et moi…je suis….l'ingrate, la désespérée de ne pas réussir à embrasser( pour lui faire hommage ) avec mes cellules grises ,pourtant volontaires, tout son savoir, toutes ses richesses, tous ses éclats de lettre. Oui…je demeure incapable de lui apporter une preuve ostentatoire de sa marque sur mon chemin,  mon quotidien,  destin…Et je râle de ne garder au fond de moi, d'elle, que des éclaboussures. De n'être qu'imprégnée partiellement.

Tout connaître, tout retenir…ce serait…

Oui….

Pouvoir à tout moment me référer à tel vers brillant de larmes de Roxane conquise…avoir sous la langue, prête à bondir, une réplique acerbe d'un Voltaire savoureusement candide, goûter sans fin l'exquise valse ternaire des phrases flaubertiennes…ne plus, ne plus se dire…j'ai lu..j'ai lu….mais qu'était-ce déjà ? qui ? et quand cela ?

Ne plus trépigner d'exigences inassouvies face à des références échappées de ma mémoire honteuse.

 

Ah …et puis…aussi….avoir le temps d'avoir caressé au moins une fois l'écorce palpitante de l'intégralité de  ses beaux livres , les avoir aimés, compris, haïs…peu importe ! Avoir pu converser de papier à oeil avec chacun : oui….. les avoir engloutis abusément.

Je manque de temps…et de mémoire….et je me dis toujours…

 

Un soir de pleine lune, alors que les clichés qui s'entassaient dans la prose regrettable d'un mauvais écrivailleur dont je taierai le nom occupaient mal mon imagination, il y eut un éclat de foudre sur mon toit….et je me retrouvai dans l'obscurité complète.

Je vis alors s'approcher de moi un miroir, comme suspendu, mais je n'avais pas peur et ne savais pourquoi.

Ce psyché oscillait de sa tête mobile en un tremblement subtil et lent qui me désarçonnait…son  châssis s'inclinait en connivence avec le balancement qu'inconsciemment mon corps avait entonné, pris d'une transe hypnotisée…je me sentais à mi-chemin entre la folie réalisée et le rêve éveillé…aussi lorsque je sentis les rides de mon front s'étirer, sensation imcrédible, je conservais cette immobilité quasi-sereine . L'objet en lévitation vint jusqu'à mon visage et  je m'y vis en reflet…enfin…. non….c'étaient bien mes traits qui se reflétaient au milieu de cette glace sombre et engouffrante…. mais s'y superposaient en un mélange de couleurs surnaturelles d'autres têtes, barbues, chauves, hirsutes, patibulaires, joviales…oui…mon visage semblait polyphorme, il irradiait de toutes parts, semblait briller davantage à chaque passation d'une nouvelle surimpression : comme revigoré.

 

Puis. Le noir.

 

 

Je ne me souviens après que d'un matin blême, tête embrumée digne des conséquences cérébrales d'une virée tardive avec quelques alcoolytes certains samedis soirs ouvrés.

Ma main sur mon front, mes lunettes vermillon posées sur un nez qui piquait, je tentais tout de même de terminer le mauvais roman de la veille…c'était la veille ?

 

Soudain : une impression bizarre…je me suis mise à réciter les piètres passages précédents  et à en rire . Je me gaussais en faisant des rapprochements avec La Nouvelle Héloïse et je comprenais alors d'où me venait ce ressenti de fadeur et de malheureux pastiche : Capable d'invoquer en son intégralité le texte de Rousseau, je mesurais l'étendue du copiage de l'Autre.

Il avait du se passer quelque chose d'incroyable. J'en tremblais.

 

Pendant quelques heures, je courais d'étagère en étagère et par flashs, la seule lecture des titres qu'imprimait ma rétine déroulait en intégralité rigoureuse les histoires fantastiques et chères que j'avais lues autrefois.

Je montai à la cime de mon échelle et j'en saisis un , au hasard, que je n'espérais jamais atteindre. Je l'ouvris et en peu de temps, peut-être cinq chétives minutes, 880 pages furent dévorées. Et étonnamment, j'en avais savouré chaque ligne, chaque paragraphe, chaque souffle de ponctuation.

Frissonnante, je redescendis les marches et atteignis chancelante un fauteuil.

 

Je pleurai….et autour de moi j'avais la sensation étrange et pénétrante que mille univers m'encerclaient, que pléthore de visages de personnages connus, lèvres entrouvertes et  décidées souriaient. «  Nous sommes là, disaient-elles, nous ne t'avons jamais quittée…nous étions quelque part dans ton coeur désarmé et tes rêves impuissants ….A ce jour , nous venons de tous nos mots porteurs d'humanité et de rêves… être toutes de dévotion à ta portée. »

 

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